Les Enfants de Venise

C’est toujours un risque de lire un deuxième roman lorsque le premier nous a enchanté c’est comme quand on a vécu une jolie passion amoureuse on attend de la deuxième la même vibration.

Après « Les Prisonniers de la Liberté »  je me suis faite happée, embarquée à nouveau pour un voyage vertigineux et romanesque.

Ce roman, est un pavé de 800 pages mais Luca Di Fulvio confirme avec Les Enfants de Venise son talent de conteur.

L’histoire:

Venise, l’an de Grâce 1515. Peu de villes auront connu autant d’injustices, de dangers, de misère et de vices.

Le jeune orphelin Mercurio tente de survivre grâce à de petits larcins. Son plus grand atout pour plumer le quidam : son génie du travestissement.

Malheureusement, un « coup » ayant mal tourné, il part chercher refuge à Venise.

Sa route croisera celle d’un prétendu médecin juif, Isaco et de sa fille la belle Guiditta, venus eux aussi s’installer dans la Cité des Doges.

Au travers d’une histoire d’amour, celle de Mercurio et Giuditta Luca di Fulvio nous fait partager une fresque historique. La vie dans la Sérénissime à cette époque y est parfaitement décrite : les riches, les pauvres qui tentent de survivre, les idées propagées par l’Inquisition, l’installation du Ghetto. Ne manquent plus que les odeurs des canaux !

Mais tout cela ne serait rien sans la richesse de la psychologie de chacun des personnages qui se croisent, s’entrecroisent et tissent une histoire que l’on ne peut lâcher.

Mais cette liberté, trouvée à Venise est fragile pour Mercurio, petit voleur des rues, qui trompe avec panache presque avec sincérité et pour Giuditta, jeune et belle Juive, dont la religion semble ici tolérée mais pour combien de temps?
Rien ne les vouait à s’aimer. Pourtant… Entre inquisiteurs et courtisanes, palais, coupe-gorge et canaux putrides, les amants de Venise feront mentir le destin…

Nous allons dans ce roman à la rencontre de deux coeurs purs. Cette histoire est infiniment romantique car cet amour mille fois contrarié ne s’éteint jamais, Mercurio et Giuditta se retrouvent toujours. Deux coeurs purs qui s’apprivoisent, un amour qui grandit dans le creuset d’une misère écrasante.

Dès les premières lignes du roman, le décor est posé:

« Le chariot des ordures, le « char à merde » comme on l’appelait dans le quartier de l’Angelo, passait une fois par semaine, le lundi »

Luca di Fulvio a su insuffler la passion dans cette Histoire, nous faire revivre avec émotion le Venise du XVIeme siècle, avec tout le cadre politique, religieux et social. Antisémitisme, jeux de pouvoirs, corruption, inégalités et injustices sont le quotidien de cette Italie en proie au fanatisme. La faille entre l’Etat et l’Eglise voit ses pires détracteurs…Au fil des pages on ressent le poids de l’Inquisition, on se confronte à la pauvreté, on respire cette misère infâme.

Ce roman m’a accompagnée plusieurs jours et j’ai vraiment eu du mal à me séparer de ces personnages si attachants. Cette lecture ne m’a pas laissé indemne car, même si il s’agit bien d’un roman, elle m’a immergée en ces temps d’Inquisition, en ces temps où la Liberté n’est pas donnée à chacun.

Zolfo, Benedetta, Mercurio, Giuditta sont orphelins, ce quatuor nous emmène explorer toutes les couches sociales de cette ville en expansion, qu’est Venise. Avec leur regard neuf, les failles sont encore plus perceptibles, plus malignes encore, peut être plus féroces.

Toute cette violence, ce chaos, cette misère, leur destin et les chemins qu’ils empruntent n’en sont que plus passionnants à suivre…

L’infiniment beau et romantique côtoie l’infiniment glauque et cruel. Tout va très vite dans ce roman, trop vite pour être lâché avant la dernière page.

De ce beau roman j’ai retenu une phrase que je vous livre ici:

« Devenir riche, ça ne veut rien dire. Tu dois vouloir quelque chose qui nourrit le coeur. Ou tu mourras à l’intérieur. »

Et sachez en refermant ce livre, que sans amour, nous ne sommes rien…

« J’aurais beau être prophète, avoir toute la science des mystères et toute la connaissance de Dieu, j’aurais beau avoir toute la foi jusqu’à transporter les montagnes, s’il me manque l’amour, je ne suis rien ».

Première lettre de Saint Paul Apôtre aux Corinthiens

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