Prisonnière mais guerriere

Je vous livre aujourd’hui une partie de moi-même, même peut-être plus qu’une partie…. Car telle est ma vie, encore aujourd’hui, je marche sur mon chemin  si chaotique, si douloureux, si problématique parfois, mais je marche encore et je sais que même dans la douleur, même prisonnière je suis une guerrière, une battante, une résiliente.

 

Cette maladie dont on ne parle jamais et qui me touche moi depuis des années, un demi-siècle en fait, n’est pas une maladie d’adolescente uniquement. Certaines, (certains aussi d’ailleurs car cette maladie touche aussi les garçons) en souffrent jusqu’à l’âge adulte et jusqu’à leur mort. Jusqu’à leur départ, parfois précipité, sans n’avoir jamais connu autre chose que les angles de cette prison. Avec tout de même parfois quelques moments furtifs où le corps se fait un peu oublié.

Quelle étrange maladie que l’anorexie mentale, combien de professeurs, médecins, cliniciens se sont penchés dessus en tentant de comprendre où elle prend sa source et comment peut-on en guérir.

Le chemin vers la guérison est long, interminablement long, d’autant plus long quand la maladie est diagnostiquée une fois l’âge adulte atteint. Cette maladie puise sa vitalité au coeur de l’enfance, l’enfance et la  pré-adolescence étant des instants cruciaux pour le développement psychique d’une personne. La maladie est provoquée invariablement par un état émotionnel que nous connaissons tous dans la vie et pourtant parfois cette émotion négative qu’est la peur a des répercussions à vie sur le comportement social d’une personne.

Toute maladie en lien avec la nourriture, anorexie ou boulimie, trouve souvent racine dans l’enfance. Il faut savoir que l’anorexie mentale est une maladie très sournoise et vient d’un sentiment très fort de peur et d’insécurité. Quand on a peur, où qu’on a subi une peur terrible au moment où l’on était enfant et qu’à cette époque on ne comprend pas ce qu’il se passe, on devient un adulte fragile émotionnellement, doté d’une hypersensibilité, instable sur le plan affectif, en quête tout le temps de quelque chose d’irremplaçable.  Toute la vie durant, cette personne mettra en place des mécanismes de défense pour sécuriser au maximum son périmètre, car la seule chose contrôlable dans la vie d’une anorexique angoissée et privée d’amour devient la nourriture. C’est la personne malade qui décide pour elle et non les autres, elle ne subit plus, elle devient capitaine, elle maîtrise, gère, contrôle.

Cette maladie est très sournoise car il n’y a rien de plus jouissif que de se sentir détaché du matériel, de la nourriture, on se sent invincible, moins on mange et plus c’est l’extase, on est au dessus, on est hors du monde, seul et heureux, à l’abri. On n’a jamais conscience de la mort qui rôde au contraire, on est enfin libre, on devient un pur esprit, inatteignable, intouchable.

J’ai perdu ma mère à l’âge de onze ans. Mes parents étaient séparés et après une période de vacances scolaires passées avec mon père, à mon retour, au mois de septembre, ma mère a décidé de ne pas me rouvrir ni la porte de la maison, ni ses bras, ni son coeur……

Sur le moment, quand on est enfant, on n’a aucune conscience des dégâts que peut faire un tel abandon, d’une personne en qui on n’a, en principe, le plus confiance, sa maman. Les conséquences viennent beaucoup plus tard et souvent on est obligé, après une multitude de tentatives de suicide avortées, de situations professionnelles complexes, d’échecs amoureux, de difficultés de socialisation, d’impossibilité de fonder une famille, une multitude de peurs, de larmes, de fugues, de kilos perdus, de trouver le courage d’aller en parler.

Malgré ce long chemin de thérapie, douloureux où il faut tenter de défaire des comportements qu’on pense salvateurs pour soi, le chemin reste parfois sans issue. La maladie s’accroche et à chaque choc émotionnel, elle ressurgit de plus belle. A chaque fois que la peur revient, rôde, l’insécurité se dresse devant vous, la maladie se dresse, elle aussi encore plus forte.

Aujourd’hui, à 60 ans demain, voilà ce qu’est ma vie, un contrôle permanent sur moi-même pour ne pas me faire mal, me brûler les ailes. Chaque déception je me l’attribue, chaque échec je me l’attribue encore et encore… Jamais je ne mets l’autre en cause.

La seule en cause ne peut être que moi, c’est moi qui suis coupable, mauvaise, puisque je n’inspire pas l’amour, ni le respect. Je me laisse berner, abuser, je m’autorise à devenir « un objet » et non un sujet, une vraie personne avec un libre-arbitre puisque ma maman n’a pas voulu m’aimer……

Et même si aujourd’hui j’ai pardonné à ma maman cet abandon si cruel, cela n’empêche pas le manque que j’ai d’elle et le trou béant d’amour qu’elle a laissé et que je ne parviendrais jamais à combler et que personne ne pourra combler c’est ainsi.

Je t’aime maman et j’espère que tu es heureuse au pays des étoiles…

 

Vous pouvez également me suivre sur Instagram et Twitter.

 

 

Rendez-vous sur Hellocoton !

ELLE…..dérange!

Je suis allée, comme à mon habitude, au cinéma mardi dernier…Ce film, j’en avais eu un avant-goût grâce à la bande annonce. Mais j’avais été aussi très attirée par la tête d’affiche d’une part qui réunit d’excellents acteurs mais surtout parce que ce film est signé Paul Verhoeven, un maître en matière de cinéma « dérangeant », je vais tenter par ce billet de vous pousser à aller au cinéma pour aller à la rencontre d’Isabelle Huppert au sommet de son talent dans ELLE.

Le réalisateur néerlandais signe là un film germano-français choquant et réjouissant à la fois, qu’il réalise à partir d’un roman de Philip Djian (Prix Interallié 2012)., un long métrage qui devient une sorte de provocation, je dirais que l’on bascule dans un univers social ambigu.
Et j’avoue que cela me va tout à fait, j’ai besoin que mes neurones s’activent quand je suis dans la pénombre d’une salle de cinéma, j’ai besoin de ressenti, de frissons, de rires ou de larmes mais il faut que je sois interpellée car pour moi c’est cela le cinéma (n’en déplaise aux cinéphiles qui sont capables de se régaler avec des comédies loufoques, à deux sous, style « Les Tuches ».
Lorsque je vais au cinéma j’ai besoin d’être « dérangée », voir choquée, et cette année cinématographique m’a donnée matière à, entre Spotlight, The Danish Girl, je vous invite d’ailleurs à aller lire mon billet sur ce film et bien d’autres, mon année a été riche en émotions et en cogitations de toutes sortes.
J’ai beaucoup aimé le dernier film de Paul Verhoeven, ELLE. A mon humble avis, il ne s’agit pas là d’un thriller mais plutôt d’un film qui délivre un message à caractère psychologique, voir même psychiatrique, une description très fine de comment devient-on ce que l’on est, comment nous construit notre histoire familiale, comment une souffrance issue de l’enfance peut-elle faire naître une pathologie ou la construction d’une personnalité perverse et manipulatrice.
Ce long métrage n’est pas un thriller à mon sens je le classerai plutôt dans la catégorie des films qu’a pu signer Alfred Hitchock (Psychose, Pas de Printemps pour Marnie).

Un film très bien réalisé. Le spectateur, malgré les 2h15 de projection, est happé par une cadence, ce film est une habile combinaison entre tension et humour où la peur côtoie le rire.
Ce film a eu sur moi un effet percutant probablement parce que j’ai été habituée par mon métier (éducatrice au Ministère de la Justice) à croiser des personnalités « particulières« , parce que je suis moi-même issue d‘une famille « problématique et toxique » donc j’ai reçu ce film comme une douche glacée, un retour vers le passé.
La machine à penser s’est mise en route à la puissance maximale ce qui a eu pour effet de me laisser chaos!

Je sais, vous allez me dire que j’ai une âme sensible mais cela m’a choquée d’entendre des gens rire dans la salle car il est vrai que les dialogues (Isabelle Huppert face aux personnes dans son milieu professionnel ou dans sa vie intime) sont savoureusement caustiques mais cela démontre et révèle une personnalité paradoxale, une intelligence, une perversité, une volonté de faire mal à l’autre, en un mot des mécanismes de défense.
Isabelle Huppert a un talent fou pour interpréter ce type de rôle, une élégance, une arrogance, une légèreté feinte, elle est excellente! Charles Berling est excellent également sans son rôle d’ex-mari qui n’arrive pas à refaire sa vie car son ex-femme ne le « lâche » pas et l’empêche de se construire une nouvelle vie. Elle garde la main mise sur lui et il devient victime.

Alors effectivement, au moment où les lumières s’éteignent et que le film commence, nous assistons brutalement et sans ménagement à une scène de viol mais le viol n’est pas pour moi le thème principal du film, ce qui est important c’est tout ce que va faire resurgir chez la victime cet acte violent, bestial, mis en scène (l’homme est cagoulé et pénètre dans sa maison).

Et la manière dont la victime réagit après l’agression (elle ramasse les débris de verre au sol et se commande des sushis!) à votre avis cela vous fait-il réfléchir? Cette situation de déni est-elle normale, aucune plainte ni auprès du commissariat de police, ni demande de soutien de ses proches….
Et c’est à partir de là que nous allons faire la connaissance du personnage et des démons qui la rongent.

Est-elle victime ou bourreau?

Je ne dois pas vous en révéler plus ce serait dommage…

Je vous engage à aller voir ce film si vous aimez le cinéma dérangeant, à une époque notre cinéaste néerlandais donnait dans la science-fiction ( Starship Troopers) puis il y a eu Basic Instinct, (on commence à toucher là le thriller psychologique) et avec ce dernier film je peux vous affirmer qu’il ne s’agit pas de science-fiction, nous sommes dans la vraie vie!
N’avez-vous jamais croisé des personnalités qui vous laissent perplexes, où qui vous dérangent par un comportement hystérique, excentrique, violent, caractériel, acides, si c’est le cas dites-vous bien que de telle personnalité ne sont pas le fruit du hasard.
Une maltraitance dans l’enfance provoque assez souvent des désordres psychologiques et parfois pour vous protéger de toute agression vous devenez soit un bourreau soit une victime!
Souvenez-vous de ce que disait Monsieur Freud l’homme est un pervers polymorphe et Paul Verhoeven nous en fait la démonstration.

Si vous voulez voir la bande annonce c’est ici.

Crédit photos: Allociné

Vous pouvez également me suivre sur Instagram et Twitter

Rendez-vous sur Hellocoton !